Un blog sur l'actualité du droit, de la philosophie, de la philosophie du droit et que sais-je encore ?


mardi 30 décembre 2014

Chose dénuée de caractère sérieux

Pas grand chose à voir avec ce qui précède. Ma fille aînée me fait remarquer que lorsque, à la fin de la Belle et la bête (de Disney, pas de Cocteau, hein, elle a les références qu'elle peut), la Bête se transforme de nouveau en prince, ce dernier prend les traits de Jean Sarkozy. Voyez par vous-mêmes, la ressemblance est troublante. 

Encore et toujours la dignité

Je n'ai pas vu “Exhibit B" et, partant, je n'ai aucune opinion à donner sur ce spectacle. Intéressante est, en revanche, l'ordonnance que le juge de référés du Conseil d'Etat a rendue le 11 décembre dernier par laquelle il rejette la requête de diverses associations tendant à ce que soit ordonnée la "suspension" (?) dudit spectacle. Le juge des référés a été ici particulièrement expéditif, usant de la procédure de l'article L 522-3 du CJA qui permet d'omettre instruction contradictoire et audience publique lorsque (pour la faire courte) il est manifeste que la requête est mal fondée. 

Du coup, le juge n'a pas vraiment soigné son argumentation, et c'est dommage.

A vrai dire, la requête même est absolument incompréhensible. Il s'agit d'un référé "liberté fondamentale". L'article L 521-2 du CJA définit ainsi ce recours  : "Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public [ici l'EPCC "Le Centquatre"] (...) aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale"). Or ici, l'enjeu est non pas de sauvegarder une liberté fondamentale, mais de demander à ce que soit limitée celle de quelqu'un d'autre (en l'espèce la liberté d'expression). Ca semble déjà bizarre. 

Du coup, les requérants font usage de la notion de dignité de la personne humaine (tiens, tiens, te revoilà toi...). La question se pose donc de savoir si la dignité de la personne humaine est une liberté fondamentale. D'un point de vue abstrait, cela ne fait aucun doute (même si ici, on pourrait se demander à quelle dignité, et de quelle personne, il est ici porté atteinte, mais je ne veux point vous bassiner de nouveau avec ça). En revanche, le droit administratif comprend la dignité de la personne comme une composante de l'ordre public. Or je ne suis pas sûr que le référé-liberté puisse être à bon droit employé pour demander à ce que l'ordre public soit maintenu – sauf bien sûr indirectement lorsque les troubles à l'ordre public résultant de l'inaction de l'administration entraînent une atteinte à une liberté fondamentale, mais ce n'est pas le cas ici, puisque la dignité de la personne humaine est pleinement composante de l'ordre public.  

C'est pourquoi on peut regretter que le juge des référés du Conseil d'Etat ait préféré prendre appui sur le contenu du spectacle pour rejeter la requête : "le spectacle « Exhibit B » avait pour objet de dénoncer les pratiques et traitements inhumains ayant eu cours lors de la période coloniale ainsi qu’en Afrique du Sud, au moment de l’apartheid". A contrario, il laisse à entendre que si le spectacle avait été une apologie de l'apartheid – et les associations requérantes, qui ne sont pas complètement connes non plus, n'affirmaient pas qu'il en fût ainsi, mais soutenaient que la frontière était précisément mince entre les deux situations, et que l'enfer est pavé de bonnes intentions –, alors ledit spectacle aurait constitué une atteinte à la dignité de la personne humaine. Dans ce cas, le juge aurait-il donné gain de cause aux requérants? Dans l'affirmative, on peut soutenir que cela reviendrait à dénaturer la fonction même du référé-liberté, qui est conçu pour protéger à très brève échéance les administrés contre certains agissements de l'administration "dans l'exercice d'un de ses pouvoirs", et non pour les habiliter à forcer l'administration à user de ses pouvoirs contre des tiers. Que le juge utilise la dignité de la personne humaine pour venir légitimer après coup des mesures de police à la légalité douteuse, passe encore; mais qu'il s'en serve pour forcer l'administration à sévir contre des tiers, voilà qui semble franchement grotesque.

Bon, je sollicite sans doute beaucoup le texte de l'ordonnance, qui n'a sans doute pas fait l'objet d'autant d'arrière-pensées de la part du juge. 

mardi 18 février 2014

Dignité et ordre public

Disclaimer : Cette entrée est un poil plus sérieuse que la précédente (non que celle-ci fût tordante); elle est également plus ennuyeuse (non que la précédente fût excessivement captivante). 

Quoi de commun entre un humoriste antisémite et la situation tragique d'un tétraplégique en état de conscience minimale ? En premier lieu, l'un comme l'autre ont amené le Conseil d'Etat à être sous les feux de la rampe à un mois d'intervalle; en second lieu, dans les deux cas le Conseil a statué dans l'urgence, saisi d'un appel contre une ordonnance de référé rendue par un tribunal administratif; en troisième lieu, dans chacun des cas, le Conseil a mobilisé la notion de dignité.

Dans le second cas, celui du jeune tétraplégique, cet usage n'a rien de bien étonnant : le Conseil ne fait qu'employer les termes des dispositions législatives applicables au litige (en particulier les articles L1110-2 et L-1110-10 du Code de la santé publique issus de la loi du 4 mars 2002 dite "loi Kouchner"). Et il n'est pas douteux, pour le sens commun, que l'une des questions qui touchent cette douloureuse affaire ait de près ou de loin rapport avec la dignité du patient.

Dans le premier cas, celui de l'humoriste antisémite, la référence à la dignité est plus surprenante.

Je vais me concentrer sur le premier cas, qui, pour n'être plus dans l'actualité (mais je n'avais pas le temps d'écrire ce texte lorsque cette affaire faisait la une des journaux), n'en est pas moins très intéressant. Je ne dirai rien du second cas, tout simplement parce que je n'ai rien de très original à dire à ce sujet.

lundi 17 février 2014

Un scandale !

Au grand dam de mes trois lecteurs, je n'ai pas été très actif sur ce blog récemment. Je sors de mon silence pour attirer votre attention un véritable scandale, dont la presse à la solde du pouvoir, comme d'habitude, s'est bien gardée de faire mention.
On a récemment dénoncé, à juste titre, l'immixtion déplorable de la théorie du genre dans les programmes scolaires et les livres pour enfants. Mais on a moins entendu parler de la non moins détestable théorie de l'espèce, qui va jusqu'à infester la production cinématographique destinée à la jeunesse.
Dernier exemple en date : un film récemment paru dans lequel un enfant a pour père adoptif un chien. Vous avez bien lu : un chien ! Que fait Jean-François Copé contre cette attaque infâme contre les valeurs de la famille traditionnelle ?