Un blog sur l'actualité du droit, de la philosophie, de la philosophie du droit et que sais-je encore ?


mardi 13 août 2013

Alain Bauer, ministre de l'intérieur et de la "réalité criminologique"

Voilà, comme ça, c'est clair.

J'aime beaucoup la fine ironie du ministre mettant en garde contre "les dangers d'une stratégie qui [fait] de la loi pénale un vecteur de communication politique". Je me tords de rire. 

jeudi 4 juillet 2013

Post scriptum

"DOMA under­mines both the public and private significance of state­ sanctioned same-sex marriages; for it tells those couples, and all the world, that their otherwise valid marriage sare unworthy of federal recognition. This places same-sex couples in an unstable position of being in a second-tier marriage. The differentiation demeans the couple, whose moral and sexual choices the Constitution protects, see Lawrence, 539 U. S. 558, and whose relationship the State has sought to dignify. And it humiliates tens of thousands of children now being raised by same-sex couples. The law in question makes it even more difficult for the children to understand the integrity and closeness of their own family and its concord with other families in their community and in their daily lives."

United States v. Windsor, 570 U.S.       (2013) (Slip Opinon, Opinion of the Court, p. 22-23)

mercredi 26 juin 2013

Ce blog parle de nouveau de mariage pour tous (en Californie)

Vous savez déjà que la Cour suprême américaine a rendu le 26 juin deux décisions très attendues. Dans United States v. Windsor, la Cour a confirmé l'arrêt de la Cour d'appel du Second Circuit déclarant inconstitutionnel la section 3 du DOMA Act. Cette section indiquait que les avantages (en matière d'impôts, de successions, etc.) que le droit fédéral reconnaît au couples mariés ne devaient pas s'appliquer aux couples de même sexe, quand bien même ceux-ci auraient dûment convolé en justes noces dans les Etats reconnaissant le "mariage pour tous". Selon la Cour, la section 3 est contraire à la Due Process Clause du cinquième amendement. On peut résumer ainsi l'opinion : dès lors qu'un mariage est légal dans un Etat, la reconnaissance de ce mariage confère au couple marié un statut et une dignité, que le gouvernement fédéral ne peut leur ôter. Le DOMA Act crée de facto une inégalité entre des cas qui ne devraient pas être inégaux (puisque les Etats les reconnaissent comme égaux). Je cite la décision : "la liberté protégée par la Due Process Clause du Cinquième amendement contient en elle l'interdiction de dénier à toute personne l'égale protection des lois" (p. 25). Par conséquent, dès lors qu'un couple est légalement marié, il a un droit constitutionnel à ne pas voir son union considérée comme un mariage de seconde zone.

samedi 8 juin 2013

Ce blog parle de nouveau de prostitution

Je suis désolé de revenir sur une de mes vieilles lubies. On sait que se prépare à l'Assemblée nationale une nouvelle proposition de loi visant à pénaliser les clients des prostituées. Je n'ai pas besoin de revenir sur les raisons de fond qui motivent mon opposition aux projets de ce genre. Je voudrais simplement poser une question, qui semble anecdotique, mais qui révèle beaucoup sur l'état d'esprit des néo-abolitionnistes: il est entendu que la loi (si la proposition de loi est adoptée) pénalisera les clients de prostituéEs; pénalisera-t-elle également les clients et clientEs de prostituÉs ? (J'ajouterais les clientEs de prostituéEs, mais je ne sais pas si cela existe). 
Si la prostitution est en soi condamnable pourquoi s'en tenir à la seule prostitution féminine ? Pourquoi est-ce la ministre des droits de la femme (et non pas le ministre de l'intérieur ou la ministre de la justice) qui a annoncé, il y a quelque temps, la détermination du gouvernement à abolir la prostitution ? 

En somme la prostitution apparaît dégradante uniquement lorsque ce sont des femmes qui la pratiquent. 

Qui est sexiste ? 

samedi 6 avril 2013

Colloque sur Hart à Paris II le 19 avril

Une fois n'est pas coutume, je m'y prends un peu à l'avance pour faire une annonce. Le 19 avril prochain aura lieu à l'Université Paris II Panthéon-Assas un colloque international consacré à la pensée de H.L.A. Hart. Ce colloque, à l'initiative du professeur Olivier Beaud et de Grégory Bligh, qui consacre sa thèse à Hart, est organisé par l'Institut Michel Villey et la Maison française d'Oxford. Vous trouverez toutes les informations nécessaires ici. J'ajoute que paraîtra prochainement une traduction aux soins de Grégory Bligh de Law, Liberty and Morality, paru il y a exactement cinquante ans.

Votre serviteur a l'honneur de participer aux travaux du colloque, mais s'il vous faut une bonne raison de venir, ce doit plutôt être le casting de stars internationales à faire pâlir d'envie le PSG réunies pour l'occasion.

jeudi 21 mars 2013

Wow

Imaginez que demain le législateur décide que les fonds de l'ANR destinés aux équipes de science politique ne puissent être alloués qu'aux projets de recherche qui "promeuvent la sécurité nationale ou les intérêts économiques de la France". Je suis sûr que mes camarades de l'UFR 11 seraient ravis. 

C'est ce ravissement que doivent éprouver actuellement leurs collègues d'outre-Atlantique. J'ai en effet appris aujourd'hui via le blog de L. Solum que le Sénat américain a adopté un amendement présenté par le formidable sénateur Coburn (républicain, it goes without saying) visant à rendre impossible toute subvention de la National Science Foundation à un projet de recherche en science politique qui n'aurait pas vocation à "promouvoir la sécurité nationale ou les intérêts économiques des Etats-Unis". 

Wow. 

L'American Political Science Association s'est fendu d'un communiqué rageur (avec argument de la pente glissante et tout et tout), qui ne changera évidemment rien, puisqu'on imagine mal la Chambre rejeter l'amendement. 

vendredi 15 mars 2013

Sur le délit d'offense et l'arrêt Eon v. France de la CEDH

La CEDH vient de condamner la France pour violation de l'article 10 de la Convention. (Vous trouverez l'arrêt, relativement bref et clair, ici). Le sieur Eon avait brandi, lors d'une visite du Président Nicolas Sarkozy à Laval en août 2008 une pancarte où figuraient les mots "Casse toi pov'con" et il avait été condamné, sur le fondement de l'article 26 de la loi du 29 juillet 1881, à 30 euros d'amende avec sursis pour offense au président de la République. Le maximum prévu par la loi étant 45000 euros, on peut dire que le sieur Eon l'a échappé belle, mais il a néanmoins formé un recours auprès de la CEDH contre l'arrêt de la cour d'appel d'Angers devenu définitif après que la Cour de cassation eut refusé d'admettre son pourvoi.

dimanche 24 février 2013

Conférence de T. Endicott à Nanterre

J'avais vu cela il y a quelque temps et puis Elodie Djordjevic a eu la gentillesse de le rappeler à mon bon souvenir : le professeur Timothy Endicott (Doyen de la faculté de droit d'Oxford) sera à Nanterre demain lundi 25 février, pour parler du rôle de l'intention de l'auteur dans l'interprétation juridique. Comme c'est un sujet qui m'est cher, je suis peiné de ne pouvoir assister à cette conférence. Tous les détails sont ici.

A ceux que ça intéresse, je conseille de lire trois papiers d'Endicott sur l'interprétation, où il n'aborde pas de front la question de l'intention, ce qui rend la conférence de demain d'autant plus alléchante:

- "Putting Interpretation in its Place", Law and Philosophy, 13/4, 1994 (un compte rendu de l'ouvrage d'A Marmor, Interpretation and Legal Theory, repris en partie dans son opus magum, Vagueness in Law, Oxford UP, chap. 8). 

- "The Only True Interpretation" in P. Comanducci et R. Guastini (dir.), Analisi e diritto 2005, Turin, Giapiccchelli, 2006) disponible en ligne.

- "Legal Intepretation" in A. Marmor (dir.), Routledge Companion to Philosophy of Law, dont une version est disponible sur SSRN.

Il peut être utile également de lire trois défenses classiques (ou, pour la dernière, plus récente) de la thèse intentionnaliste en matière d'interprétation législative, thèse qu'Endicott attaquera demain. 

- Le locus classicus est A. Marmor, Interpretation and Legal Theory, 2e édition, Oxford, HArt Publishing, 2005 [1ère ed. 1994, OUP]

- Pour une théorie "minimale" de l'interprétation, sans doute compatible avec l'argument général d'Endicott, voir J. Raz, "Intention in Interpretation" in Between Authority and Interpretation, Oxford, Oxford UP, 2009.

- Plus récemment, Richard Ekins a mis en avant une défense robuste de la thèse intentionnaliste dans The Nature of Legislative Intent, Oxford, Oxford UP, 2012. Vous trouverez l'introduction de l'ouvrage sur SSRN.

Enfin, pour un aperçu des controverses classiques sur le sujet, l'article de MacCallum reste indépassable: G. MacCallum, "Legislative intent", Yale Law Journal, 75/5, 1966. 

vendredi 15 février 2013

Décès de Ronald Dworkin

J'ai comme tout le monde appris sur Leiter hier le décès de l'un des plus illustres philosophes du droit contemporains, Ronald Dworkin. Je ne sais pas si la postérité gardera de lui ses positions substantielles en philosophie politique, morale et du droit ou les nombreuses controverses dans lesquelles il s'est engagé. 

mardi 29 janvier 2013

"Le voile très transparent du mystère"

En préparant un cours, je retombe sur ces lignes formidables de l'immortel Immanuel (expression sous copyright JB). La nbp est de l'auteur. 

"Un autre déguisement, qui est certes facile à pénétrer, mais auquel néanmoins la loi contraint le peuple, est celui de la véritable nature de sa constitution. Ce serait léser la majesté du peuple britannique que de dire de lui : c'est une monarchie absolue.